La Débâcle – 2240

Dans le village de Balan, la pluie cessa. Prosper décida Silvine à manger un morceau de pain qu’il avait eu la précaution d’emporter. Il était déjà onze heures. Mais comme ils arrivaient près de Sedan, un poste prussien les arrêta encore ; et, cette fois, ce fut terrible, l’officier s’emportait, refusait même de rendre le laissez-passer, qu’il déclarait faux, en un français très correct, d’ailleurs. Des soldats, sur son ordre, avaient poussé l’âne et la petite charrette sous un hangar. Que faire ? comment continuer la route ? Silvine, qui se désespérait, eut alors une idée, en songeant au cousin Dubreuil, ce parent du père Fouchard, qu’elle connaissait et dont la propriété, l’Ermitage, se trouvait à quelques cent pas, en haut des ruelles dominant le faubourg. Peut-être l’écouterait-on, lui, un bourgeois. Elle emmena Prosper, puisqu’on leslaissait libres, à la condition de garder la charrette. Ils coururent, ils trouvèrent la grille de l’Ermitage grande ouverte. Et, de loin, comme ils s’engageaient dans l’allée des ormes séculaires, un spectacle qu’ils aperçurent les étonna beaucoup.