La Débâcle – 2584

Les premiers jours, la fièvre du blessé fut si intense, qu’Henriette ne le quitta guère. Chaque matin, en passant, le docteur Dalichamp entrait, sous le prétexte de la prendre, pour se rendre avec elle à l’ambulance ; et il examinait Jean, le pansait. La balle, après avoir cassé le tibia, étant ressortie, il s’étonnait du mauvais aspect de la plaie, il craignait que la présence d’une esquille, introuvable pourtant sous la sonde, ne l’obligeât à une résection de l’os. Il en avait causé avec Jean ; mais celui-ci, à la pensée d’un raccourcissement de la jambe, qui l’aurait rendu boiteux, s’était révolté : non, non ! il préférait mourir que de rester infirme. Et le docteur, laissant la blessure en observation, se contentait donc de la panser avec de la charpie imbibée d’huile d’olive et d’acide phénique, après avoir placé au fond de la plaie un drain, un tube de caoutchouc, pour l’écoulement du pus. Seulement, il l’avait averti que, s’il n’intervenait pas, la guérison pourrait être extrêmement longue. Dès la seconde semaine, cependant, la fièvre diminua, l’état devint meilleur, à la condition d’une immobilité complète.