La Débâcle – 455

Maurice ne put lui répondre, hésitant. D’après ce qu’il avait lu à Reims, il lui semblait difficile que la IIIe armée, commandée par le prince royal de Prusse, fût à Vouziers, lorsque, l’avant-veille encore, elle devait camper à peine du côté de Vitry-le-Français. On avait bien parlé d’une 4e armée, mise sous les ordres du prince de Saxe, qui allait opérer sur la Meuse : c’était celle-ci sans doute, quoique l’occupation si prompte de Grand-Pré l’étonnât, à cause des distances. Mais ce qui acheva de brouiller ses idées, ce fut sa stupeur d’entendre le général Bourgain-Desfeuilles questionner un paysan de Falaise pour savoir si la Meuse ne passait pas à Buzancy et s’il n’y avait pas là des ponts solides. D’ailleurs, dans la sérénité de son ignorance, le général déclarait qu’on allait être attaqué par une colonne de cent mille hommes venant de Grand-Pré, tandis qu’une autre de soixante mille arrivait par Sainte-Menehould.