La Débâcle – 594

Alors, le camp tomba dans une nuit d’encre, dans un silence de mort. Malgré la fraîcheur de la nuit, on avait défendu d’allumer des feux. On savait les Prussiens à quelques kilomètres, les bruits eux-mêmes s’assourdissaient, de crainte de leur donner l’éveil. Déjà, les officiers avaient averti leurs hommes qu’on partirait vers quatre heures du matin, pour rattraper le temps perdu ; et tous, en hâte, dormaient gloutonnement, anéantis. Au-dessus des campements dispersés, la respiration forte de ces foules montait dans les ténèbres, comme l’haleine même de la terre.